Influence du vent sur le temps de vol (1)

Les règlements EASA imposent au commandant de bord de s’assurer qu’il dispose du carburant nécessaire avant le vol, et de gérer son carburant en vol (cf. articles NCO.OP.125, NCO.OP.125, NCO.OP.185, SERA.2010, SERA.11012).
Il faut donc notamment tenir compte de l’influence du vent sur le temps de vol. Voici une formule simple que je n’ai jamais vue dans les manuels, ainsi qu’un tableau qu’on pourra consulter pour avoir une idée des ordres de grandeur.

Soient
-Vp votre vitesse propre, par exemple 100 kt;
-W la composante de face de la vitesse du vent, par exemple 20 kt.
On note q={\frac{W}{V_p}} , soit avec les données de l’exemple q=0.2 ou 20% ou {\frac{1}{5}} .
Si vous n’aimez pas les formules, allez directement au tableau en fin d’article.
La majoration du temps de vol due au vent est donnée par la formule
\frac{1}{1-q}-1 qu’on peut aussi écrire sous la forme
\frac{q}{1-q} , soit avec les données de l’exemple:
\frac{0.2}{1-0.2}=\frac{0.2}{0.8}=\frac{2}{8}=\frac{1}{4} ou 25%, ou encore 15 minutes par heure. (J’ai détaillé pour aider ceux de mes lecteurs qui auraient oublié comment manipuler des fractions).
Ce qui veut dire qu’au lieu de mettre une heure pour un trajet de 100NM sans vent, il vous faudra une heure et quart en tenant compte du vent.
Cette formule donne la majoration pour un trajet avec du vent de face.
Elle donne aussi la minoration si le vent est favorable, il suffit d’inverser le signe de q. Si le même vent est de dos la variation de temps de vol sera de
\frac{-0.2}{1+0.2}=-\frac{0.2}{1.2}=-\frac{2}{12}=-\frac{1}{6} ou 10 minutes par heure ou environ 17%.
Ce qui veut dire qu’au lieu de mettre une heure pour un trajet de 100NM sans vent, en tenant compte du vent favorable il vous faudra 10 minutes de moins, c’est à dire 50 minutes.

Voici un tableau des valeurs remarquables :

Quotient du vent par la vitesse propre {\frac{Vent}{Vitesse}} Augmentation du temps de vol en % en cas de vent de face Perte de temps en minutes par heure en cas de vent de face Diminution du temps de vol en % en cas de vent de dos Gain de temps en minutes par heure en cas de vent de dos
{\frac{1}{10}}=10% {\frac{1}{9}}≈11% ≈7 {\frac{1}{11}}≈9% ≈5
{\frac{1}{9}}≈11% {\frac{1}{8}}=12½% {\frac{1}{10}}=10% 6
{\frac{1}{8}}=12½% {\frac{1}{7}}≈14% ≈9 {\frac{1}{9}}≈11% ≈7
{\frac{1}{7}}≈14% {\frac{1}{6}}≈17% 10 {\frac{1}{8}}=12½%
{\frac{1}{6}}≈17% {\frac{1}{5}}=20% 12 {\frac{1}{7}}≈14% ≈9
{\frac{1}{5}}=20% {\frac{1}{4}}=25% 15 {\frac{1}{6}}≈17% 10
{\frac{1}{4}}=25% {\frac{1}{3}}≈33% 20 {\frac{1}{5}}=20% 12
{\frac{1}{3}}≈33% {\frac{1}{2}}=50% 30 {\frac{1}{4}}=25% 15
{\frac{1}{2}}=50% 100% (doublement du temps) 60 {\frac{1}{3}}≈33% 20
1= 100% {\frac{1}{2}}=50% 30

Vous constatez que le gain par vent favorable est toujours inférieur, et ce d’autant plus si le vent est fort, que la perte par vent de face.
Maintenant supposons que vous alliez à la verticale de la destination, puis vous revenez sans vous arrêter. À l’aller vous avez souffert du vent de face, mais au retour vous bénéficierez d’un vent favorable. Cependant ceci ne compense jamais cela. Dans notre exemple au lieu de mettre deux heures pour un trajet aller-retour de 100NM sans vent, il vous faudra 1h15 + 50 minutes = 2h05.

La majoration du temps de vol dans un aller-retour peut-être calculée directement en faisant le produit du pourcentage d’augmentation par vent de face et du pourcentage d’augmentation par vent favorable, dans notre exemple \frac{1}{4} \cdot \frac{1}{6}=\frac{1}{24} soit 2½ minutes par heure ou environ 4%. Un trajet aller-retour de 100NM, soit 2 heures sans vent sera ainsi majoré 2 x 2½ = 5 minutes, on retrouve bien les 5 minutes de majoration du paragraphe précédent.

Portance d’un rotor d’hélicoptère en stationnaire

Je vais bientôt commencer ma formation au brevet de pilote d’hélicoptère. Vous trouverez donc de temps en temps sur mon blog des articles sur l’hélicoptère1.
On trouve dans le manuel technique d’utilisation de l’hélicoptère, chez Cépaduès, la formule suivante, attribuée à Froude, pour un hélicoptère en stationnaire:
V_i=\sqrt{\frac{m g}{2 \rho S_r }}
Avec
Vi la vitesse induite, vitesse du flux d’air au travers du rotor (m.s-1),
m la masse de l’hélicoptère (kg),
g l’accélération de la pesanteur (m.s-2),
ρ la densité de l’air (kg.m-3),
Sr la surface du rotor (m2).
Considérons le rotor comme un dispositif qui augmente de façon discontinue la pression au passage de l’air, sans discontinuité de vitesse. La tranche du tube de courant qui entoure le flux d’air passant au travers du rotor a une surface Sr lors du passage du rotor, et à l’infini vers le bas une surface S. La pression dans ce tube à l’infini haut et à l’infini bas est Ps, la pression statique. Juste au dessus du rotor la pression est P, juste en dessous P+. La vitesse à l’infini haut est nulle, la vitesse à l’infini bas est V.FroudeJPEG
La conservation de l’énergie dans le tube de courant entre l’infini haut et la limite haute du rotor permet d’appliquer le théorème de Bernoulli:
(A) Ps = ½ ρ Vi2 + P
Idem pour la partie basse du tube de courant:
(B) Ps + ½ ρ V2 = P+ + ½ ρ Vi2
On a considéré que l’influence de la gravité était négligeable par rapport à l’influence du rotor et, bien entendu, puisqu’on applique le théorème de Bernoulli, que la compressibilité était négligeable.
On note ΔP = P+ – P
On tire de (B)-(A)
(C) ΔP = ½ ρ V2
Le système étant établi, le débit massique est le même au passage du rotor et à l’infini bas, l’air traversant Sr pendant une durée dt a donc la même masse que l’air traversant S pendant la même durée: ρ Sr Vi dt= ρ S V dt
On a donc
(D) Sr Vi = S V
Appliquons maintenant le principe de la dynamique.
Pendant une durée dt, l’accroissement de la quantité de mouvement du système est égal à la quantité de mouvement de la tranche d’épaisseur V dt qui sort de la surface S , puisque pendant le même temps la tranche d’air qui entre par le haut a une vitesse nulle. Cet accroissement est égal à la somme des forces appliquées au système, dans notre hypothèse Sr ΔP puisqu’on a notamment négligé la pesanteur.
La quantité de mouvement de la tranche d’épaisseur V dt étant ρ S V dt V on a donc
\frac{d\vec p}{dt}= \rho S_\infty V_\infty^2
Le principe de la dynamique s’écrit donc ρ S V2 = Sr ΔP, et en combinant avec (D) on a
(E) ΔP = ρ Vi V
En éliminant ΔP entre (E) et (C) on obtient
(F) V = 2 Vi
Soit en combinant avec (E)
(G) ΔP = 2 ρ Vi 2
La machine étant en stationnaire, la portance est égale au poids, ce qui s’écrit
(H)\Delta P = \frac{m g}{ S_r }
En éliminant ΔP entre (G) et (H) on obtient V_i=\sqrt{\frac{m g}{2 \rho S_r }} CQFD sauf erreur de ma part.

Le rotor du Robinson R44 II a 198 pouces (503 cm) de rayon (p 1-3 du POH),sa surface fait donc 78 m2. La masse maximale est de 2500 livres (1134 kg), la densité standard au niveau de la mer est de 1.225 kg.m-3.
On trouve une vitesse induite de 8 m.s-1 ou 15 kt, 1500ft.mn-1, 27 km.h-1.
Il reste à faire un autre article sur les conclusions qu’on peut tirer de cette formule.
1. Je continuerai cependant à faire des articles sur les avions, surtout si vous me le demandez, et je continuerai aussi mon activité d’instructeur avion.